Colloque final de la Chaire d’université de l'UCLy sur les Vulnérabilités
« Pourquoi devrions-nous prendre soin du lointain, de l’inconnu, de l’étranger ? Qu’il s’agisse de l’avenir incertain de notre planète ou du migrant qui frappe à notre porte ? » La question posée par Roger Koudé, professeur de Droit international de l’UCLy, résonne chaque jour dans l’actualité comme notre vie quotidienne.
Les systèmes, sources de vulnérabilité
Que ce soit dans le droit, la biologie, la psychologie ou la philosophie, les enseignants-chercheurs rassemblés voient apparaître des points communs dans les vulnérabilités de nos sociétés. Aujourd’hui, les systèmes complexes sur lesquels reposent notre prospérité deviennent eux mêmes la source de crises nouvelles. « Une crise nous dit d’abord quelque chose de terrible » reconnaît Adrien Didelot, neurologue à l’hôpital Saint-Joseph Saint-Luc. « Derrière un système qui s’effondre ce sont des hommes et des femmes qui tombent. »
Pierre Hainaut, président du cancéropôle de Lyon, montre l’existence de ces défis dans la lutte contre le cancer. Les thérapies modernes sont plus efficaces que jamais, de plus en plus précises et individualisées… Mais chaque avancée fait émerger de nouveaux défis et dilemmes. Le biologiste craint aujourd’hui l’émergence d’une médecine stratifiée, réservée à ceux qui disposent des moyens financiers ou des bons marqueurs biologiques. « Le vrai enjeu de nos systèmes, c’est d’identifier les valeurs sur lesquelles on veut se baser et se battre ! » conclut-t-il. « Il s’agit d’être forts autour de systèmes solidaires et d’être capables de faire vivre ces valeurs »
« La crise est le propre de l’homme »
Loin de se contenter d’un constat défaitiste, de nombreux chercheurs ont choisi d’explorer les ressources à notre disposition pour faire face à nos vulnérabilités. Tout commence peut-être par une admission. « Il y a un grand paradoxe contemporain autour de la vulnérabilité » explique Chiara Pesaresi, Directrice scientifique de la Chaire vulnérabilités et Maître de conférences en philosophie. « Elle est omniprésente, mais fait l’objet d’un refoulement systématique. Au niveau individuel ou collectif, la vulnérabilité est vue comme un échec dégradant. Notre société entretien un culte de la performance qui est un déni de la vulnérabilité. »
Pourtant, selon la philosophe, c’est au cœur des crises elles-mêmes qu’il est possible de trouver les opportunités de transformer la société. « Une crise est une manifestation de notre vulnérabilité au plan collectif. Elle révèle quelque chose de nous-mêmes à nous-mêmes. » Les périodes de crises deviennent ainsi des étapes inévitables qu’il faut apprendre à traverser pour éviter l’effondrement. « Il s’agit d’explorer un potentiel transformateur, à partir des failles et des fragilités de l’être humain. »
Notre société entretien un culte de la performance qui est un déni de la vulnérabilité.
Chiara Pesaresi, directrice scientifique de la Chaire Vulnérabilités
Une analyse partagée par Karine Meaux, responsable du Département Solidarités Internationales et Urgence de la Fondation de France. Une leçon qu'elle tire de ses expériences humanitaires sur le terrain. « Les catastrophes génèrent de l’hospitalité, elles génèrent de la solidarité bien que les personnes se trouvent dans des situations de vulnérabilité accrue. La crise peut devenir un accélérateur de choses positives. »
Dans son intervention, le Pr. Olivier Artus, Recteur de l’UCLy, a choisi de chercher ces ressources dans la Bible. Il y trouve des leçons qui restent aujourd’hui d’actualité. « Confrontée aux défis de l’Histoire, la société ancienne répond de manière pratique. Face aux crises du monde moderne, la Bible ne nous donne donc aucune recette, mais elle nous rappelle opportunément que des solutions inventives et innovantes existent. »
