Valérie Aubourg, Vice-rectrice chargée de la Recherche de l’UCLy, Professeure en anthropologie et membre de la Chaire d’Université Vulnérabilités participe à travers son intervention introductive à mettre en perspective les enjeux et l’urgence d’une pensée de la vulnérabilité dans nos sociétés contemporaines.
L’acceptation de la vulnérabilité n’est pas résignation mais invitation à la lutte face à l’épreuve qui nous traverse sous la forme de la douleur, mais aussi du chômage, de la souffrance et du malheur sous toutes ses formes.
Valérie AUBOURG, Membre de la Chaire d'Université Vulnérabilités
En tant qu’ethnologue, la question consiste à se demander, qu’est-ce que l’approche ethnologique nous dit de la vulnérabilité ?
Pour commencer, notons que les ethnologues sont toujours très attentifs aux raisons qui conduisent un observateur à mener ses enquêtes et en retour, à l’effet des enquêtes menées sur le chercheur lui-même.
En second, relevons le fait que la vulnérabilité ne peut être envisagée en dehors du contexte historique et sociétal dans lequel elle se déploie. Cela amène notamment l’ethnologue à constater combien ce qui peut être considéré comme vulnérable en un lieu, se voit appréhendé de manière totalement opposée en une autre partie du globe ou une autre époque.
En troisième, soulignons le fait que la vulnérabilité est peu traitée comme telle dans le champ de l’ethnologie. Cette absence traduit une hésitation car ce concept encourt le risque d’être réduit à un contexte - guerre, pandémie, crise économique etc.-, alors que ces différents champs sont liés entre eux dans l’expérience des vulnérabilités. Ce concept encourt également le risque d’être réduit à des catégories de personnes -l’enfant, l’adolescent, la personne âgée, les femmes, les personnes en situation de handicap, les migrants-. Par conséquent, l’appréhension de la vulnérabilité devra privilégier une anthropologie conjonctive (et non disjonctive).
Pour finir, si nous pouvons considérer la vulnérabilité comme naturelle et affirmer qu’elle est le propre du vivant, il ne s’agit pas pour autant d’en faire l’apologie. L’anthropologie, et en particulier la démarche ethnopsychiatrique, postule qu’une société saine, une société non pathologique, préfère la vie à la mort. Considérer la vulnérabilité comme naturelle ne nous dégage pas de toute responsabilité à l’égard de celui qui l’éprouve de manière plus intense. Une ethnologie engagée nous enjoint de lui porter attention, de lui apporter notre soutien, de le protéger.